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paisnissartbis - site officiel
18 avril 2010

Résistance des intellectuels…

En dehors du professeur Henri Sappia, d’autres intellectuels niçois ont regimbé contre l’assimilation totale de l’entité niçoise par la France. Ce combat ne pouvant à l’époque être mené au grand jour, les récalcitrants usèrent de prétexte, dont le principal fut la défense de l’ancienne langue niçoise. Pierre Isnard, avocat et érudit, apparenté à Masséna et à Jean-Baptiste Vérany, mena durant des années à l’Académià une guerre de tranchée qui mérite d’être saluée. Récemment, a été dispersée aux enchères une célèbre et très riche bibliothèque niçoise et nous avons pu consulter un dossier très intéressant, à savoir certaines archives de Pierre Isnard, dont le dossier qu’il avait constitué sur ses rapports tumultueux avec l’Acadèmia ; j’aborderai donc le sujet en pleine connaissance de cause et livrerai au public des éléments inédits, prouvant que cette association, à l’époque, était totalement solidaire du pouvoir français pour taire la vérité au sujet de tout ce qui de près ou de loin avait trait à l’annexion de 1860, en même temps que certains de ses membres tentaient de « provencialiser » Nice.

Déjà en 1920, Isnard, comme jadis Madeleine Malgat avec sa pièce « Les Barbets » se vit censuré ; le 2 juillet 1920 le secrétaire de l’Acadèmia lui écrivait : « Je suis en train de préparer le Nice-Historique de juillet-août et je compte y insérer les deux pièces que vous avez écrites et qui ont été primées récemment au concours de l ‘Acadèmia. Toutefois, votre poésie « La Nissarda »…me paraît contenir au premier, au 3e et au 4e couplets, des expressions qui pourraient peut-être prêter à double sens et nous attirer des critiques ; j’ai quelques scrupules à les insérer dans Nice-Historique… Voudriez-vous avoir l’extrême obligeance de me dire si on ne pourrait pas couper le 3e et le 4e couplet, ou tout au moins, alors, en changer certains termes… ? ». Les couplets en question paraphrasaient la Marseillaise, remplaçant la France agressée par Nice envahie ; le quatrième transformait le célèbre « Amour sacré de la Patrie… » en « Amor sacrat, amor de Nissa, Se turna mai de l’ennemic, La fuola manega si drissa, Armenen tui per lu castic. Ch’ora vendrà de n’en defendre, Cuontra dai vile maufatan, Se beson n’es, li nobli issendre, Dai nuostre muorte s’ausseran… ». La réponse d’Isnard fut celle que l’on imagine, et le texte parut dans Nice-Historique et plus tard dans L’Armanach Nissart. Les incidents se reproduisirent : en décembre 1926, ce furent des « Noëls » composés par Isnard et pourtant primés par l’Acadèmia qu’on lui demanda de réformer, sous prétexte de désaccord orthographique.

Le 21 décembre Isnard répondit : « …J’ai l’honneur de vous faire connaître que dans ces conditions je m’oppose absolument à la publication de mon Noël… et je refuse le prix… ». Le 14 janvier 1927, Isnard protesta auprès du président de L’Acadèmia au sujet d’une fausse étymologie attribuée au mot « ratapignata » et conclut « …Pourquoi chercher toujours à dénaturer notre beau dialecte pour essayer de lui donner une origine qui n’est pas la sienne ? C’est le rôle de l’Acadèmia que d’empêcher cette œuvre néfaste et j’aime à croire, malgré tout, qu’elle saura la remplir… » ; quelques jours après, le 30 janvier, le récalcitrant adressa le courrier suivant au président : « A cause des dispositions de certains membres du conseil de direction à mon égard et dans un esprit d’apaisement que vous apprécierez très certainement, j’ai l’honneur de vous prier de vouloir bien ne pas compter sur la causerie que j’avais accepté de faire à l’Acadèmia Nissarda le 20 mars prochain. Croyez etc.. ». Le baron de Bellet tenta de noyer le poisson et de récupérer l’orateur : « Monsieur et cher collègue, Je vous prie de me pardonner si je viens vous relancer au sujet de la conférence du 20 à l’Acadèmia. Je crois me souvenir qu’en fin de compte, vous l’avez définitivement retirée, mais j’ai eu encore un doute, car il me semble que notre conversation a été interrompue au conseil… » ; réponse d’Isnard : « …Je persiste à croire qu’il vaut mieux que je ne fasse pas à l’Acadèmia la causerie que vous avez eu l’amabilité de me demander. J’ai d’ailleurs interrompu sa préparation après les fâcheux incidents de décembre et de janvier dernier et je n’aurai pas le temps de me mettre en état, comme l’on dit au Palais, d’autant plus que je dois donner une conférence aux naturalistes le 16 mars et une autre au Museum le 17… ».

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